Il est une idée reçue à la vie dure : pour être aimé, il faut être beau. Enfin du moins comme notre XXIème siècle le conçoit. Mais, ne serait-ce pas une idée fausse à effets désastreux ?
Chacun cherche son alter ego. Toutefois, cette quête d’amour s’avère plutôt complexe car nous croyons devoir réunir et posséder certains critères pour nous penser aimables. Se débarrasser de ce fantasme réducteur ouvre pourtant à la rencontre tant attendue.
Ces images idéales qui font souffrir
La chanson de Souchon le dit bien : « On nous Paul Lou Sullitzer… On nous… ». Régulièrement, nous sommes soumis à d’incessantes comparaisons de soi à un autre présenté comme premier ou première et donc à imiter pour gagner absolument ; en découle immanquablement une dénarcissisation dommageable. Selon ces schémas récurrents, il n’existe qu’un seul modèle de réussite, de bonheur, de beauté… Ne pas en être, c’est être condamné à l’échec. Donc, même si l’on sait intuitivement que cette image n’est pas soi, on tente désespérément de s’en approcher, jusqu’à se nier dans cette impasse. Rappelons-nous, au panthéon des célébrités, Édith Piaf, petit bout de femme, loin de tous les canons de beauté classiques, qui jamais ne masqua ses failles ; toute sa vie, elle fut portée par l’amour. Quid alors de ces critères réputés indispensables ? Impossible ici, et heureusement, de faire la liste infinie de celles et ceux qui, par leur vie, ont démontré le peu de fondement de ces idéaux que l’on dit être des sésames de l’amour.
La supposée beauté parfaite
Beaucoup d’entre nous ont, un jour ou l’autre, ressenti le poids de regards perçus dévalorisants. De cette perception découle alors une certitude : je ne suis pas aimable. C’est ainsi qu’on perd l’estime de soi mais pas seulement quant à son image corporelle, cela pouvant aller jusqu’au repli sur soi et même jusqu’à l’auto exclusion. Pour alléger ce fardeau parfois écrasant, on recourt à diverses stratégies afin de se modifier, se transformer : dress codes qui permettent de se fondre dans la masse, régimes pour atteindre une apparence consensuelle ou même chirurgie esthétique pour éradiquer ce qui est supposé enlaidir. Oui, certes, on s’approche ainsi de l’image admirable à atteindre mais encore ?… Si l’on ne rencontre pas celui (ou celle) tant désiré(e), on en conclut d’office qu’il manque quelque chose pour parfaire cette panoplie de la personne-belle-donc-aimable. Et cette recherche de l’image idéale à renvoyer se poursuit sans fin. Peut-être alors qu’admirer ou être admiré n’est pas aimer ou être aimé ?
L’amour qui fait envie
Ne dit-on pas d’un couple d’amoureux qu’ils sont beaux ? D’autant que comme le chantait Brassens, puis Renaud, des amoureux qui se bécotent sur les bancs publics, la sainte famille machin aimerait pouvoir se conduire comme eux… D’ailleurs, même seul, l’être amoureux se reconnaît d’un regard. Qui n’a croisé à l’occasion quelqu’un habité d’un sourire tel qu’il ne peut passer inaperçu. À y regarder de plus près, peut-être ne sourit-il pas et pourtant c’est évident : il y a de l’amour dans l’air. A qui s’adresse ce sourire ? Comme suspendue, bizarrement cette personne regarde sans voir. Elle ne cherche nullement à séduire, provoquer ou rivaliser. En fait, elle ne cherche pas. Elle a trouvé son complément. Et remplie de cet amour, elle n’a nul besoin de conquérir qui que ce soit pour quelque raison que ce soit. Tout tentative de prise de pouvoir, d’agression ou de revendication s’annule d’elle-même. Elle semble hors de portée de tous ces contrôles.Bien qu’apparemment sur un petit nuage, loin de tout, elle ne refuse pas de répondre si on la sollicite. Facile à aborder, accueillante, sans aucune retenue, elle accepte de parler. D’ailleurs, sa présence agit comme un aimant sur l’entourage irrésistiblement attiré par ce soleil rayonnant. Ancrée dans une certitude qui l’emplit, elle ne se positionne pas sur la défensive et donne à voir cette énergie positive qui l’illumine. Convaincue d’être aimée, elle se pense donc aimable. Par suite, on ne la regarde pas quant à son physique mais quant à l’énergie qu’elle dégage. D’où vient sa beauté ? Elle ne cherche pas à dissimuler, masquer, fuir, agresser, s’imposer ou contrôler, bref à mettre en œuvre tout ce qui tisse un relationnel fondé sur la relation de force. Elle n’a pas besoin de ces armes-là. Elle s’accepte telle qu’elle est, elle qui a été désirée comme elle est. C’est cette énergie qui la rend belle avec son physique qui n’a pas changé. Par manque de confiance en soi, elle aurait pu le percevoir comme dysharmonieux. Or, à l’évidence, il n’a pas été un obstacle à l’amour. Ainsi, à l’exact opposé de l’idée reçue, la beauté n’attire pas forcément l’amour mais à l’évidence l’amour rend beau.
Françoise Buscail
Le développement personnel
dans Signes & sens magazine